Chefs d'entreprise, sachez prendre au sérieux les signalements de harcèlement moral ou sexuel !

C'est votre responsabilité d'être à l'écoute des victimes et témoins, de vérifier les faits et de prendre les mesures nécessaires pour mettre fin à ces comportements inacceptables.

En agissant avec diligence, vous protégerez vos employés et préviendrez tout risque de récidive.

 

N'hésitez pas, c'est l'intérêt de votre entreprise et de votre équipe !

 

Définition du harcèlement sexuel en milieu professionnel :
Le harcèlement sexuel se définit par des propos ou des comportements à connotation sexuelle ou, à compter du 31 mars 2022, à caractère sexiste, répétés, qui portent atteinte à la dignité de la victime en raison de leur nature dégradante ou humiliante, ou qui créent à son encontre une situation intimidante, hostile ou offensante.

À compter du 31 mars 2022, le harcèlement sexuel sera également constitué en cas de harcèlement de groupe.

Lorsqu'un même salarié subit de tels propos ou comportements de la part de plusieurs personnes, de manière concertée ou à l'instigation de l'une d'entre elles, cela sera considéré comme du harcèlement sexuel, et ce même si chacune des personnes impliquées n'a pas agi de façon répétée ou successivement.

De plus, le fait d'user de toute forme de pression grave dans le but réel ou apparent d'obtenir un acte de nature sexuelle, que celui-ci soit recherché au profit de l'auteur des faits ou d'un tiers, sera assimilé à du harcèlement sexuel, et ce même en l'absence de répétition.

Déployer des mesures de prévention du harcèlement en milieu professionnel


Conformément à la réglementation en vigueur, l'employeur a l'obligation de mettre en œuvre toutes les actions de prévention du harcèlement moral ou sexuel prévues aux articles L 4121-1 et L 4121-2 du Code du travail, telles que des campagnes d'information et de formation.

Il engage sa responsabilité civile dès lors qu'un de ses salariés est victime de tels agissements, et ce indépendamment de sa qualité d'auteur.


Cette responsabilité s'applique non seulement aux cas de harcèlement perpétrés par ses propres employés, mais également par des personnes extérieures à l'entreprise qui exercent une autorité hiérarchique ou fonctionnelle sur les salariés (par exemple un intervenant externe).

Ainsi, dans le cadre de sa politique de prévention, l'employeur doit notamment :
- informer les salariés sur le harcèlement et les sanctions encourues ;
- Indiquer dans le règlement intérieur de l'entreprise les dispositions du Code du travail relatives au harcèlement ;
- évaluer le risque de harcèlement dans le document unique d'évaluation des risques ;
- dans les entreprises d'au moins 250 salariés, nommer un salarié référent en matière de harcèlement ;
- Mettre au point une procédure interne de signalement et de traitement des faits de harcèlement.

 

Réaction prompte face à une déclaration de harcèlement
L'employeur est dans l'obligation de mettre un terme au harcèlement dès qu'il en est informé. Par conséquent, lorsqu'un cas de harcèlement est signalé au sein de l'entreprise, il est impératif que l'employeur prenne ce signalement au sérieux et y réponde de manière appropriée. Toute inaction de sa part risquerait d'être considérée comme une faute susceptible de contribuer au harcèlement moral.

Indépendamment de la modalité du signalement, il est recommandé d'en confirmer la réception auprès de son auteur et d'établir une liaison avec la victime dans le but de recueillir ses clarifications.

 

Une enquête devra être diligentée pour s'assurer de la réalité des faits signalés, afin d'y mettre un terme et, le cas échéant, de sanctionner leur auteur. Cette investigation pourra être confiée à un organisme externe spécialisé dans les risques psychosociaux. Quoi qu'il en soit, il conviendra de se conformer à la procédure prévue par tout accord, charte ou règlement intérieur de l'entreprise applicable à cette situation et d'y associer les représentants du personnel, le cas échéant.

 

Il résulte d'un arrêt de la Cour de Cassation en date du 27 novembre 2019 (n°18-10551) que l'employeur qui s'abstient de toute action et ne diligente pas d'enquête interne suite à la dénonciation par un salarié d'agissements supposés de harcèlement moral, que ceux-ci soient prouvés ou non, est défaillant dans son devoir de garantir la sécurité.

L'employeur se doit d'entreprendre une véritable investigation. Il ne peut se borner à organiser un ou deux entretiens avec le salarié ayant à maintes reprises dénoncé des faits de harcèlement moral, se contentant de mettre en doute la véracité de ces allégations sans diligenter une enquête approfondie (CA Douai, 28 février 2019, n°17/05008).

 

Lorsque la première investigation des faits démontre que les éléments dénoncés ne constituent pas un cas avéré de harcèlement, il est dans l'intérêt de l'employeur de recevoir le salarié à l'origine de la déclaration, afin de lui exposer les motifs pour lesquels aucune suite ne sera donnée. À l'inverse, si l'analyse des faits laisse supposer que le salarié a effectivement été victime de harcèlement, une enquête discrète et impartiale doit être menée, visant à établir la réalité de ces faits par l'audition des personnes concernées et la collecte des preuves pertinentes.

 

La législation en vigueur garantit la protection des victimes et des témoins de harcèlement. Ainsi, aucun salarié, stagiaire ou personne en formation ne peut faire l'objet de sanctions, de licenciement ou de mesures discriminatoires pour avoir subi ou refusé de subir des actes de harcèlement, ou pour avoir témoigné de tels agissements ou les avoir relatés (Code du travail, articles L 1152-2 et L 1153-3).

Toute rupture de contrat de travail résultant de tels actes, ainsi que toute disposition ou tout acte contraire, sont nuls de plein droit (Code du travail, articles L 1152-3 et L 1153-4). Dans le cas où, après enquête, les faits signalés s'avèrent non établis ou ne constituent pas un harcèlement, la personne ayant effectué le signalement ne peut faire l'objet de sanctions, sauf en cas d'accusations mensongères.

Pour prouver le caractère mensonger d'une accusation de harcèlement, l'employeur doit démontrer que le salarié avait connaissance de la fausseté des faits qu'il a dénoncés.

 

L'entreprise se doit de sanctionner sévèrement l'employé auteur de harcèlement moral ou sexuel. Le harcèlement sexuel est considéré comme une faute grave, justifiant un licenciement. S

'agissant du harcèlement moral, la faute grave est admise sous réserve que l'employeur démontre la gravité des agissements et l'impossibilité de conserver le salarié dans l'entreprise.

Lorsque l'employeur envisage de licencier un salarié pour motif de harcèlement, il est tenu de se conformer à l'ensemble des règles applicables à la procédure de licenciement.

En particulier, la procédure de licenciement doit être engagée dans un délai de 2 mois suivant la date à laquelle l'employeur a eu connaissance des faits reprochés. De plus, en cas de litige, l'employeur est dans l'obligation d'apporter la preuve de la faute grave invoquée. Dans ce contexte, un rapport écrit de l'enquête menée peut s'avérer très utile.

À cet égard, dans un arrêt du 17 mars 2021 (n°18-25597), la Cour de Cassation a admis un rapport d'enquête comme moyen de preuve, bien que l'auteur présumé des faits n'ait pas été auditionné dans ce cadre, mais simplement informé des conclusions de l'enquête lors de son entretien préalable.

Néanmoins, il est fortement recommandé de procéder à l'audition de l'auteur présumé des faits afin de garantir une certaine objectivité de l'enquête.

 

Pour éviter que les faits de harcèlement ne se reproduisent, il est essentiel d'aller plus loin que le simple licenciement de l'auteur.

Lorsque le harcèlement moral s'inscrit dans une véritable méthode de gestion, c'est l'ensemble de l'organisation qu'il convient de remettre en question. La formation des managers à la reconnaissance et à la prévention du harcèlement est un investissement indispensable pour votre entreprise.

N'hésitez pas à vous entourer d'un coach thérapeute et des représentants du personnel, du service de santé au travail et de l'inspection du travail, qui pourront vous épauler dans cette démarche de changement nécessaire.